"Ils m'ont dit de te payer en nature", "je te trouve très gay"... Un arbitre formateur mis à pied par la Fédération française de basket

Arbitre reconnu du basket français, Johann Jeanneau se retrouve au cœur d’une affaire de harcèlement moral et sexuel. Mi-février, il a été mis à pied, tandis que les instances fédérales continuent leur enquête interne.

Considéré comme une référence dans le milieu de l'arbitrage français depuis ses débuts en 2004, l'arbitre de 49 ans Johann Jeanneau ferait pour l'instant l'objet d'aucune poursuite judiciaire.


Photo : Maxime Giralt


Il s’appelle Léo* et il a osé parler. Ou plutôt écrire ce qu’il dit avoir vécu. Et c’est un vrai coup de tonnerre dans le monde du basket français. Ce qu’il a rapporté sur le réseau social LinkedIn sont des propos qu’aurait tenu Johann Jeanneau, 49 ans, arbitre formateur salarié à la Fédération française de basket-ball (FFBB) depuis 2005. Ce sont ces propos qui ont conduit à sa mise à pied à titre conservatoire mercredi 12 février.

Le jeune arbitre a dénoncé des messages à connotation sexuelle envoyés par le formateur dès 2016. Des SMS du genre : "C'est pas parce qu'on est au régime qu'on ne peut pas regarder le menu !" ou encore "Ils m'ont dit de te payer en nature" et "Je te trouve très gay...". Ces messages auraient été envoyés à plusieurs arbitres masculins. Certains officiels pensent même qu’il aurait monnayé des faveurs sexuelles en échange de bonnes notes ou d'autres avantages.

Capture d'écran LinkedIn

Cinq signalements depuis décembre

Depuis son élection à la tête de la FFBB en décembre, Jean-Pierre Hunckler a confirmé avoir reçu cinq signalements qui visent un salarié de la Fédération pour harcèlement moral et/ou sexuel. Une enquête interne a été lancée dès la troisième semaine de décembre. "Ce dossier est important, je le suis de très près et même s'il y a des décisions dures à prendre, elles seront prises", affirme le président.

Tout a commencé fin décembre avec la publication sur LinkedIn, où Léo* y raconte avoir subi des "propos inacceptables" et des "avances explicites" de la part d'un cadre formateur en position d’autorité, suivies de situations de harcèlement moral et de diffamation. En début d’année, deux femmes arbitres ont également rapporté des "propos totalement déplacés et inappropriés" de la part de Johann Jeanneau lors d'un stage à Bourges. Ces témoignages ont poussé la Fédération à suspendre ce dernier "dans l'urgence".

En plus des cinq signalements, plusieurs arbitres qui ont suivi des formations avec le formateur rapportent des "situations troublantes". Comme lors d'un stage en 2019, où l’homme de 49 ans aurait léché une sucette de manière suggestive après une question d'un jeune officiel. Trois ans plus tôt, il aurait invité un arbitre à venir chercher son lot, après une victoire à un quiz, sur le pas de sa porte de chambre à la tombée de la nuit. Des suspicions de harcèlement moral et sexuel circulaient déjà à cette époque parmi les arbitres.

S'il y a besoin, nous activerons l'article 40”

La Fédération a tenté de garder cette affaire en interne, mais le dossier Johann Jeanneau n'est pas nouveau. Il est connu des services de la Fédération et du Ministère des Sports depuis plusieurs années. Une première enquête interne il y a deux ans n'avait rien donné. Cette fois, le cabinet de la ministre des Sports confirme avoir été saisi par la FFBB, mais ne communique pas sur les affaires en cours d'instruction.

Pour l'instant, la Fédération n'a pas jugé nécessaire d'avertir la justice en vertu de l'article 40 du code de procédure pénale, qui oblige toute autorité à informer le procureur de la République en cas de connaissance d'un crime ou délit. "On voulait des compléments d'information et des témoignages avant de transmettre [le signalement] mais s'il y a besoin, nous activerons l'article 40", justifie Jean-Pierre Hunckler.

De son côté, Johann Jeanneau, en retrait de la scène sportive, n’a pas souhaité réagir à cette affaire “tant que tout ne sera pas réglé”. 


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